Wallis prénom de la semaine pour la Cour de Récré de Jill Bill.
Mais où va-t-elle nous chercher tout ça ?
Ce matin, comme tous les matins, le
Père Paterne se rend dans son église histoire d'imiter Don Camillo et tailler une petite bavette avec Jésus et les habitants à demeure que sont l'ange Blaise toujours coincé dans son bigorneau et
Doria la petite étoile semeuse de muguet.
Mais ce qui change des autres matins,
c'est la curieuse odeur de peinture qui règne. Venceslas, l'âne peintre se serait-il laissé enfermer ?
Le Père Paterne commence donc une
tournée d'inspection, vite bouclée car l'église de Bigorbourg n'a quand même pas la taille de Notre-Dame de Paris et que Venceslas est plus gros et moins furtif qu'un chat !
Perplexe, il se gratte la tête et
renifle une nouvelle fois, pas de doute ça sent bien la peinture.
Il se met donc à fureter sous le regard
bienveillant de Jésus dans les bras de sa mère. (Juste une parenthèse, il y a bien une croix au-dessus de l'autel, mais elle est vide, le Père Paterne est un sensible il
préfère Jésus enfant plutôt que supplicié).
Lorsqu'il passe près de la statue, il
lui semble entendre un petit rire. Jésus et Marie se moqueraient-ils de lui ? Il lève la tête prêt à engager la conversation lorsqu'il reste sidéré.
Depuis qu'il est prêtre à Bigorboug,
cette statue a toujours été vaguement blanche, vaguement grise et là, ahuri, il contemple une vierge revêtue d'une somptueuse robe bleue parsemée de fleurettes jaunes, l'auréole bien dorée, le
teint délicatement rosé avec un sourire cerise. Jésus, brun et potelé, est enveloppé dans … Paterne est tellement sidéré qu'il en choit sur le premier banc à portée, Jésus, donc, est enveloppé
dans un plaid écossais vert et rouge.
Oui, vous avez bien lu, l'enfant Jésus
sourit de toutes ses dents au milieu d'un tartan que ne renierait aucun clan écossais.
Le Père Paterne se creuse la tête,
voyons, voyons, sa fidèle gouvernante Pélagie n'aurait quand même pas osé allonger son café matinal d'une bonne rasade de Calvados quand même !
Il secoue le chef, histoire de
s'éclaircir les idées et de dissiper ce qui doit être une hallucination, à nouveau il regarde la mère et l'enfant, et… ils sont toujours aussi, aussi, comment dire, aussi étonnants, voire
détonants !
Un brin égaré, il fouille l'église du
regard, il ne voit décidément rien, pas d'âne farceur, pas de bigorneau mort de rire.
Pour en avoir le cœur net, il va voir
Blaise et l'interroge. Mais l'ange fait la sourde oreille et Paterne sent bien que ce coquin jubile.
Un léger mal de tête commençant à se
faire jour, il préfère sortir et aller se promener.
Lorsqu'il revient, l'après-midi, lesté
du délicieux repas de Pélagie, il envisage la vie avec beaucoup plus de sérénité. Il a sûrement dû rêver.
Il entre à nouveau dans l'église et
l'odeur de peinture est encore là ! C'est maintenant les deux colonnes qui encadrent Marie et Jésus qui se sont transformées. Les motifs végétaux qui les décorent arborent maintenant des teintes
multicolores somptueuses. Paterne se rend même compte qu'il aperçoit maintenant des détails qui jusqu'à maintenant lui avaient échappé, ici des oiseaux se nichent entre les branches, là c'est le
museau d'une souris qui pointe, ailleurs il devine la queue d'un renard qui disparait dans les profondeurs de la pierre.
Bref, s'il n'avait pas les pieds sur
terre, le Père Paterne crierait au miracle, encore qu'à Bigorbourg ce ne soit pas une impossibilité ! Mais que voulez-vous, il faut croire que son second prénom est Thomas parce qu'il décide de
tirer ce mystère au clair.
La nuit venue, il se glisse
subrepticement dans son église. L'odeur de peinture est toujours bien là, mais en plus, il y a maintenant une lumière dorée qui luit, tandis qu'une voix douce chantonne.
A pas de loup, Paterne s'approche et
là, il découvre palette dans une main, pinceau dans l'autre, une charmante jeune femme, échappée des années "Peace and Love", cheveux parés des fleurs, revêtue d'une robe chamarrée, qui
tranquillement s'occupe à peindre un angelot qui semble tellement content de ses belles ailes mauves qu'on le sent prêt à s'envoler.
Le Père Paterne n'a même pas le temps
d'interpeler l'étrange demoiselle que celle-ci se retourne et lui sourit.
"Bonsoir mon père ! Que
pensez-vous de mon travail ?"
"Eh bien, euh"
balbutie le Père Paterne
"c'est un peu surprenant, je dois
dire !"
Un rire perlé lui répond
"Surprenant certes, mais je ne
fais que rendre à votre église les couleurs qu'elle a perdu au fil du
temps."
Paterne ne peut
qu'opiner.
Et maintenant, les Bigorbourgeois
lorsqu'ils viennent faire un petit tour à l'église peuvent admirer les œuvres de Wallis et c'est chaque fois une surprise et un bonheur de se laisser porter par l'imagination de cette drôle
d'artiste.
(Vous avez bien sûr noté mon idée
tordue : Wall pour les murs bien sûr)